AV5FU

Paul victime d’une toxicité au 5-FU (photo d’illustration)

15 décembre 2022 – Coup de tonnerre : Des pharmaciens parlent enfin !

Ce que dénonçait AV5FU de l’extérieur est enfin dénoncé de l’intérieur.

Des pharmaciens du centre hospitalier de Saint-Quentin parlent dans une publication de la revue Le Pharmacien Clinicien (voir ci-dessous).

Ce qui ressort de leur “confession” est que, malgré l’obligation des autorités sanitaires, dans leur centre hospitalier :

  • Seulement 21% des patients sont testés correctement
  • Que certains prescripteurs (oncologues) falsifient les tests.

Question d’AV5FU :

  • POURQUOI ?
  • Ce centre est-il une exception ?
  • Qu’en est-il du sort des victimes ?
  • Qu’en sera-t-il des sanctions ?
  • QUE FAIRE devant cette inhumanité ? 

Voici le résumé in extenso de la publication :

Contexte

Le fluorouracile, anticancéreux largement utilis, est responsable de toxicités sévères chez 20 % des patients. Ces toxicités sont liées au déficit d’activité de l’enzyme permettant son élimination, appelée dihydropyrimidine déshydrogénase (DPD). Il est admis que 3 % des patients présentent un déficit partiel et 0,01 % un déficit complet. La mesure de l’uracilémie permet l’identification des déficits en cette enzyme. Elle sera ≥ 16ng/mL en cas de déficit partiel et ≥ 150ng/mL en cas de déficit complet. Une diminution de moitié de la posologie en fluorouracile devra être appliquée lors de la première cure pour les déficits partiels et le traitement sera contre indiqué pour les déficits complets. En avril 2019, la recherche de ce déficit devient obligatoire et une alerte a été mise sur notre logiciel d’aide à la prescription (LAP).

Objectifs

L’objectif de cette étude est de faire un état des lieux des dosages d’uracilémie chez les patients traités par fluorouracile.

Patients et méthodes

Une étude rétrospective a été réalisée entre avril 2019 et mars 2021 incluant l’ensemble des patients ayant reçu au moins une cure de fluorouracile depuis l’obligation de réalisation du dosage. Pour chaque patient, la date et le résultat du dosage de l’uracilémie, la posologie en fluorouracile prescrite lors de la première cure ainsi que les effets indésirables ont été colligés.

Résultats

Cent quatre-vingt-neuf patients ont été inclus, majoritairement traités pour des protocoles digestifs (89 %). Pour l’ensemble des patients, le prescripteur a bien indiqué la prise en compte des résultats de l’uracilémie. L’uracilémie était disponible pour 40 patients (21 %) avant leur première cure. Pour les 149 patients restants (79 %), 92 ont eu le résultat du dosage avant la 2e cure, 5 avant la 3e, 1 avant la 4e et la 5e et 50 patients (26 %) n’ont jamais eu de prélèvement (malgré la prise en compte de l’uracilémie par le prescripteur). L’uracilémie moyenne (n=139) était de 11,7ng/mL [3,3–59,3ng/mL] avec 21 patients (15 %) présentant un déficit partiel ; aucun patient ne présentait un déficit complet. Pour les 21 déficitaires partiels, 2 ont eu une adaptation de la fluorouracile. Pour les autres, 68 % ont présenté des effets indésirables sans que le lien de causalité soit établi avec le traitement (asthénie, anorexie, mucite et décès). Pour les patients n’ayant pas eu de dosage, 18 (36 %) ont présenté des effets indésirables avec notamment des altérations de l’état général, des diarrhées et des éruptions cutanées.

Discussion/conclusion

Le dosage de l’uracilémie est une obligation depuis avril 2019 pour tout traitement par fluorouracile. Cette étude montre que cette obligation n’est pas intégralement respectée dans notre centre malgré l’alerte pour la prise en compte des résultats d’uracilémie sur notre LAP. Lors de la révision annuelle des protocoles, une nouvelle sensibilisation des prescripteurs sur le risque encouru par le patient et sur la conduite à tenir en cas de déficit en DPD a été réalisée. Un prochain audit est prévu pour suivre l’évolution.

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3 février 2023 – Quand les victimes mettent à mal les spécialistes du Ministère de la Santé et de l’INCa.

En septembre 2019, dix experts, Barin et al., aux compétences imposantes *, publient à la demande du Ministère de la santé et de l’INCa, dans la revue European Journal of Cancer (Elsevier) une étude sur la toxicité des chimiothérapies à base de 5-FU sous le titre : « Toxicities associated with chemotherapy regimens containing a fluoropyrimidine : A real-life evaluation in France »  (https://www.ejcancer.com/article/S0959-8049(19)30756-7/fulltext).

A sa lecture, nous découvrons que les auteurs ont, entre autres, estimer le nombre de morts pour l’ensemble de la France, à partir d’un seul et unique cas survenu dans un échantillon de 513 patients du Poitou-Charentes. En autres résultats ahurissants, par une extrapolation consistant en une simple multiplication, les auteurs arrivent à 150 morts par an pour la France.

Le vulgum pecus, avec son bon sens paysan, se pose immédiatement la question : si dans l’échantillon il y avait eu aucun mort, les auteurs auraient-ils trouvé 0 mort pour l’ensemble de la France ?

Devant le refus des auteurs à corriger ou à rétracter leur article, nous avons décidé, avec un collègue statisticien de l’AIMSIB, Bernard Guennebaud, de répondre aux auteurs à travers une communication à l’éditeur de la revue appelée « letter to the editor » ( https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959804923000606?dgcid=author). Ce type de soumission sert à identifier une erreur importante dans l’article publié, elle conduit généralement à la publication d’une déclaration de clarification (correction ou rétractation).

Les erreurs que nous avons dénoncées sont multiples :

  • Détermination par des extrapolations erronées des nombres des effets indésirables graves et létaux.
  • Intervalles de confiance (indicateurs permettant de chiffrer la zone d’incertitude des résultats) théoriquement faux
  • Choix au hasard des algorithmes de calcul.

Nous avons également mis en avant, le danger que représente cette publication. En effet, elle a été citée plus de 30 fois et présentée dans au moins deux congrès sans que personne ne trouve rien à redire. Une équipe suisse a même repris tels quels les résultats en les divisant par 8 car il y a 8 fois moins d’habitants en Suisse qu’en France.

* Chantal Barin-Le Guellec : Laboratoire de Biochimie et Biologie Moléculaire, Unité de Pharmacogénétique, CHU de Tours, INSERM U1248-IPPRIT, CHU de Limoges, Attachée de Coopération Scientifique et Universitaire au sein du service scientifique de l’ambassade de France au Canada

* Claire Lafay-Chebassier : Service de Pharmacologie Clinique et Vigilances, INSERM U1084-LNEC/ INSERM CIC 1402, Université, CHU de Poitiers.

* Isabelle Ingrand : Service de Pharmacologie Clinique et Vigilances, Unité d’Epidémiologie et Biostatistique, , Registre Général des Cancers Poitou-Charentes,  INSERM CIC 1402, Université, CHU de Poitiers.

* Jean-François Tournamille : Unité de Biopharmacie Clinique Oncologique, Pharmacie, CHU de Tours.

* Adeline Boudet : OMEDIT Région Centre, CHU de Tours.

* Mary-Christine Lanoue : OMEDIT Région Centre, CHU de Tours.

* Gautier Defossez : Unité d’Epidémiologie et Biostatistique, Registre Général des Cancers Poitou-Charentes, INSERM CIC 1402, Université.

* Pierre Ingrand : Professeur de santé publique et bio-statistique, directeur de l’Institut universitaire de santé publique de l’université de Poitiers, président de l’observatoire régional de la santé Poitou-Charentes, Unité d’Epidémiologie et Biostatistique, Registre Général des Cancers Poitou-Charentes, INSERM CIC 1402, Université.

* Marie-Christine Perault-Pochat : Professeur des Universités – Praticien hospitalier, Service de Pharmacologie Clinique et Vigilances, INSERM U1084-LNEC/ INSERM CIC 1402, Université, CHU de Poitiers, Responsable du Centre de Pharmacovigilance de Poitiers (CRPV), Membre titulaire du Comité scientifique permanent « Surveillance et pharmacovigilance » de l’ANSM.

* Marie-Christine Etienne-Grimaldi : Responsable du Laboratoire d’Oncopharmacologie du Centre Antoine Lacassagne, Nice.

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5 septembre 2023 – Les victimes retoquent Hill

Solidarité d’épidémiologistes oblige, le 16 mai 2023, Catherine Hill, épidémiologiste à l’institut de cancérologie Gustave Roussy, bien connue des plateaux de télévision et de radio notamment lors de la crise sanitaire du COVID, dans une lettre à l’éditeur, vole au secours de Barin et al. (https://www.ejcancer.com/article/S0959-8049(23)00254-X/fulltext).

Dans sa lettre, elle reprend à son compte les erreurs mathématiques faites par Barin et al. en y ajoutant ses propres erreurs de biologie et de génétique concernant le déficit en DPD.

La lettre de Hill est retoquée par Bernard Guennebaud et Alain Rivoire dans une lettre à l’éditeur de l’European Journal of Cancer parue le 5 septembre 2023 sous le titre : “Response to response to letter entitled: Re: Toxicities associated with chemotherapy regimens containing a fluoropyrimidine: A real-life evaluation in France” (https://www.ejcancer.com/article/S0959-8049(23)00381-7/fulltext).

 

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