Le système français d’indemnisation mis en place par la loi Kouchner de 2002 relative aux “droits des malades” a été une avancée importante pour les victimes d’infections nosocomiales et d’accidents médicaux. Mais il n’est pas adapté aux victimes d’effets indésirables graves de médicaments :
- Très grandes variations d’interprétation des situations des victimes, d’une part entre les experts, mais aussi entre les organismes chargés d’instruire les demandes d’indemnisation (Commissions de conciliation et d’indemnisation – CCI, Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux, des Affections Iatrogènes et des Infections Nosocomiales – ONIAM) ;
- Procédures d’expertise généralement très douloureuses, humiliantes et éprouvantes. La victime est souvent d’emblée suspecte de mauvaise foi « pour obtenir de l’argent » ;
- Expertise cherchant à décorréler les symptômes des causes, du fait de la difficulté à démontrer l’imputabilité du médicament dans la survenue d’un effet indésirable grave, par exemple lorsqu’il survient à distance du traitement, ou lorsqu’il y a plusieurs médicaments suspects ;
- De nombreuses victimes exclues de l’indemnisation, car la date d’administration du traitement en cause doit être postérieure au 4 septembre 2001 (date d’application de la loi Kouchner).
De plus, le budget de l’ONIAM est un budget contraint, voté dans le cadre du PLFSS (budget de la sécurité sociale). Ce mode de financement de l’ONIAM, outre qu’il exonère les fabricants de leur responsabilité, a pour conséquence :
- Des moyens humains inférieurs aux besoins (les finances de l’Etat priment sur la situation des individus), avec comme conséquence une extrême lenteur dans l’instruction des dossiers, bien loin du délai de 6 mois prévus par la loi (il peut s’écouler plus de 5 ans entre la date de dépôt d’un dossier et une proposition d’indemnisation !)
- Un montant d’indemnisation largement inférieur à celui alloué par les juridictions civiles ou administratives, ce qui amène de nombreuses victimes à refuser l’offre et à avoir recours à la justice (ce qui, avec les appels, peut allonger la procédure de 6 ans).
- Une volonté de l’ONIAM de récupérer au plus vite les sommes qu’il pourrait avoir engagées. Ainsi, s’il a versé une indemnisation suite à une décision d’un tribunal de première instance, il cherche à récupérer immédiatement cette somme dès lors qu’une cour d’appel aura annulé le jugement précédent, sans attendre la décision d’une cour de cassation saisie par la victime.
- Alors même que les plus hautes juridictions (Conseil d’Etat par exemple) reconnaissent une imputabilité entre tel produit de santé et un dommage spécifique, l’ONIAM refuse d’appliquer cette jurisprudence, bafouant ainsi les règles établies. Elle oblige alors la victime à s’engager dans un parcours judiciaire long et coûteux, alors même qu’elle est souvent en situation de grand handicap et d’invalidité, voire décédée.
Au final, nous faisons un double constat :
- Le système d’indemnisation actuel maltraite les victimes de produits de santé ;
- Tout est fait pour décourager les victimes, alors que celles-ci n’ont eu que le tort de faire confiance au traitement qui leur était proposé (voire imposé, dans le cadre des vaccinations obligatoires).